Nous sommes à la fin des années 70 sur l'île de la Réunion. Le maloya, surgissant d'une période d'amnésie refait soudainement surface sous le kayamn affûté de Firmin Viry. Ce chant des esclaves, douloureux et combatif vient conforter un mouvement identitaire très fort qui se détache du paysage politique d'alors : les départementalistes au pouvoir tentent d'étouffer les élans de culture réunionnaise en laquelle ils ne distinguent que le signe d'une marginalité et d'un indépendantisme dérangeant.
Mais la rage pacifiste éclate dans l'intimité des fumées des kabars, fêtes secrètes où la « créolité » mène la danse. A la tête de ces actes de résistances musicaux : Ti Fock, Granmoun Lélé, Danyel Waro et Gilbert Pounia se serrent les coudes dans ces années difficiles. La poésie, les contes, les chansons et les danses se déversent en trombe dans des fonkèr revivifiants où le rythme du maloya n'en finit pas de se libérer de plusieurs siècles d'oubli.
En 1979, trois jeunes amis plein d'entrain, Gilbert Pounia, Bernard Payet et Alain Armand nourrissent avec enthousiasme l'idée de fonder une association culturelle pour « la valorisation et la propagation de la Culture réunionnaise ». Le projet est lancé, il manque juste un nom : Sirandane ? Beau-dommage ? Non, finalement, c'est roulant sur les routes sinueuses de l'île, assis dans leur voiture que Gilbert propose Ziskakan à ses compagnons.
Enfin baptisée par son leader, l'association militante connaît alors un essor inattendu en rendant aux réunionnais les saveurs de leur Culture par les sons de la poésie, les rythmes de la musique, du chant et de la danse, et par les rêveries créoles enseignées par les contes. Regroupant des intellectuels férus d'Histoire, de Littérature et de Culture, le collectif joue sur tous les fronts et séduit aussi une large partie de la population en lançant le magazine Sobat-koz, la radio libre Ziskakan et en créant le GREC (Groupe de recherches et d'études créoles).
merci dominick974
Les années 1980 sont marquées par un foisonnement de formations musicales aux compositions et arrangements autant inventifs qu’éclectiques dont la plupart alimentent le nouveau genre du « maloya électrique » (Ziskakan, Ousanousava, Baster, Ravan…). Les textes deviennent de véritables monuments littéraires qui s’éloignent du format court du maloya « traditionnel ». Musicalement, les sources d’inspirations sont aussi bien internationales que françaises et locales. Sur le plan du message apparaissent des thèmes devenus essentiels depuis. Nous pourrions tous les rassembler sous celui de « l’identité », chose d’autant plus compréhensible qu’il s’agit d’inventer une culture et que, dès lors, tout un ensemble de sujets s’imbriquent.....
En filigrane, on l’aperçoit pourtant au travers d’un constant travail de métaphorisation, élément central de l’esthétique réunionnaise, qui sollicite les thèmes du dénuement, du métissage, du marronnage ou encore, et peut-être surtout, celui de la liberté. Les bases d’une nouvelle musicalité sont jetées par des groupes jouant encore de nos jours un rôle de tout premier plan, y compris lorsqu’ils reprennent, comme lors du 20 décembre 2006, les répertoires de leurs débuts, devenus à leur tour depuis une « musique populaire traditionnelle ».
Les années 1980 sont marquées par un foisonnement de formations musicales aux compositions et arrangements autant inventifs qu’éclectiques dont la plupart alimentent le nouveau genre du « maloya électrique » (Ziskakan, Ousanousava, Baster, Ravan…). Les textes deviennent de véritables monuments littéraires qui s’éloignent du format court du maloya « traditionnel ». Musicalement, les sources d’inspirations sont aussi bien internationales que françaises et locales. Sur le plan du message apparaissent des thèmes devenus essentiels depuis. Nous pourrions tous les rassembler sous celui de « l’identité », chose d’autant plus compréhensible qu’il s’agit d’inventer une culture et que, dès lors, tout un ensemble de sujets s’imbriquent.....
C’est le cas de Ziskakan (« jusqu’à quand ? »), groupe qui marqua durablement les esprits avec son premier album, Bato fou (1981). Proches du milieu militant et universitaire, ses paroliers lancent alors des phrases-choc telles « Maloya i casse les zoreilles gros blancs » (dans « 20 désanm »), « Tu vas connaître la souffrance quand notre pays sera accosté à la France » (dans « Bato fou »), « Non l’esclavage est pas bien mort (…) Madame Desbassayns est encore vivante » (dans « Sarda »). « Douloungué », composé par Gilbert Pounia, est possiblement l’œuvre la plus explicite de la discographie réunionnaise se référant à l’esclavage. Enregistrée en public, elle retrace en près de 7 minutes le calvaire d’un esclave – de son enlèvement à sa terre natale (« Douloungué zanfan l’Afrique ») à sa seconde capture par des chasseurs de marrons et aux sévices qui en découlent – pour s’achever par ce cri : « Pourri esprit dominateur, esprit colonisateur, esprit profiteur ! ».
Benjamin Lagarde-L’esclavage dans le maloya (1981-2006)
Benjamin Lagarde-L’esclavage dans le maloya (1981-2006)
any chance to upload this again please?
ReplyDeleteyes!I hope in some days...
Deleteready..
Delete